Conseil Scientifique
du LOOF
Mise au point relative
à
« La péritonite
infectieuse féline et aux coronavirus félins »
En 1963, Holzworth à
Boston a diagnostiqué pour la première fois la péritoniteinfectieuse
féline (PIF) à l'Angell Memorial Animal Hospital, et son
agentétiologique, le Coronavirus félin (FCoV), a été découvert par
Ward quelques annéesplus tard en 1970. Plus tard il a été compris
que les chats pouvaient s’infecterfréquemment par le coronavirus
félin sans qu’il y ait de conséquences cliniques etque dans de rares
cas ces infections pouvaient provoquer la PIF,
maladiesystématiquement mortelle.
Agent étiologique
La Péritonite
Infectieuse Féline (PIF) est une maladie infectieuse virale due àun
virus de la famille des Coronaviridae. Les Coronavirus félins (FCoV)
sont desvirus sphériques et enveloppés, de grande taille.
On distingue deux
biotypes de Coronavirus félins, en fonction de leur virulence :
Le FeCV (Feline
Enteric Coronavirus) est un coronavirus très infectieux maispeu
pathogène. Il est responsable d’une entérite bénigne ou d’une
infectionasymptomatique.
Le FIPV (Feline
Infectious Peritonitis Virus), se répliquant activement dans
lesmonocytes-macrophages, est le virus responsable de la PIF mais il
est peutransmissible d’un chat à l’autre (2).
Ces deux virus sont
extrêmement proches génétiquement, et il est courammentadmis que le
virus FIPV dérive du virus FeCV par mutation génétique.
Transmission du
Coronavirus félin
La transmission de
l’infection est liée à l’excrétion du Coronavirus félin FeCVdans les
selles par des chats adultes porteurs asymptomatiques. L’excrétion
viraledébute deux jours après l’infection et dure plusieurs semaines
à quelques mois après l’infection. Elle peut être intermittente ou
chronique. Les litières constituent donc la principale source de
virus. Il faut souligner que les chats atteints de PIF neconstituent
pas une source de contamination car ils n’excrètent pas ou peu le
virus ; la souche de biotype FIPV étant principalement localisée
dans les macrophages. Ce sont donc les chats porteurs
asymptomatiques qui présentent un risque épidémiologique important
dans la transmission du coronavirus félin maisc’est la forme non
pathogène FeCV.
En raison de la faible
résistance du virus dans le milieu extérieur, la
transmissionindirecte semble jouer un rôle faible dans la
propagation du virus. La transmission se fait donc essentiellement
par contact direct avec un animal infecté ou des selles
contaminées.
Cependant, le coronavirus félin peut résister jusqu’à sept semaines
dans le milieu extérieur à température ambiante mais n’est présent à
dose infectieuse, c'est-à-dire en quantité suffisante pour permettre
l’infection d’un animal, que pendant les deux à trois premières
semaines. Il peut donc y avoir transmission via les vêtements ou des
objets pendant cette période (3).
Il n’y a pas de
transmission in utero.
Symptômes
L’infection d’un
animal par une souche de biotype FeCV non pathogène conduit
fréquemment à une infection chronique asymptomatique. Ce virus se
multiplie dans l’intestin et est excrété dans les selles. Ce virus
est très répandu dans la population féline surtout en collectivité,
proche de 90%. Chez ces animaux alors infectés de manière chronique
le virus continue à se multiplier provoquant séquentiellement des
pics de virémie et une excrétion fécale intermittente du virus.
L’animal reste donc contagieux et au cours de la multiplication
virale, la souche FeCV peut muter en souche FIPV et provoquer une
PIF. Ce virus FIPV a essentiellement un tropisme pour les cellules
sanguines, les monocytes-macrophages et peut disséminer dans
différents organes rein, rate, foie, encéphale…. Les symptômes de la
PIF peuvent donc être très variés (3, 4).
La maladie débute par
des symptômes non spécifiques, d’anorexie, léthargie
etd’hyperthermie ne rétrocédant à aucune thérapeutique. La phase
d’état peut ensuite prendre deux formes cliniques :
- une forme exsudative
(PIF humide) caractérisée par l’apparitiond’épanchements abdominaux
et/ou thoraciques
- une forme non
exsudative (PIF sèche) dont l’expression clinique varieselon les
organes lésés.
Forme humide
Cette forme représente
65 à 80 % des cas de PIF selon les sources bibliographiques. Les
signes cliniques généraux de la forme humide sont liés à la présence
d’un épanchement. Lors d’ascite, on relève à l’examen clinique une
distension abdominale lorsque l’épanchement abdominal est important,
associée ou non à des troubles respiratoires. En cas d’épanchement
pleural, une dyspnée restrictive et une tachypnée avec ou sans
discordance sont observées par le clinicien.
Forme sèche
Cette forme représente
20 à 34% des cas de PIF selon les sources bibliographiques.La
présentation clinique peut être très variable et dépend des organes
atteints. Son diagnostic clinique est donc plus difficile. Une
hyperthermie persistante, ne répondant pas à une antibiothérapie
systémique ou récurrente, est fréquente lorsde PIF sèche. Les autres
anomalies cliniques pouvant être rencontrées sont: un abattement, un
amaigrissement progressif avec perte de l’appétit.Les chatsatteints
de PIF sèche présentent fréquemment des signes nerveux. La forme
nerveuse de PIF se traduit cliniquement par une ataxie cérébelleuse
associée à une uvéite.
Dans tous les cas, le
taux de létalité de la PIF est de 100%.( si on ne traîte pas )
Diagnostic viral
Le diagnostic de la
PIF est très complexe, il l’est d’autant plus du fait de l’existence
de ces deux coronavirus FeCV et FIPV qui sont très difficiles à
distinguer.
Le contexte
épidémio-clinique et les anomalies biochimiques et hématologiques
orientent vers une suspicion clinique de PIF. Il convient alors de
chercher à confirmer la présence de l’infection virale. Deux
méthodologies sont possibles : la recherche d’anticorps dirigés
contre le coronavirus félin ou la recherche du génome viral
Mise en évidence
des anticorps dirigés contre les coronavirus félins
La recherche
d’anticorps peut se faire soit à partir d’un prélèvement sanguin ou
d’épanchement en cas de forme humide de la PIF. Il existe des tests
rapides, utilisables en clinique vétérinaire, mettant en évidence
ces anticorps mais ils sont non-quantitatifs. L’analyse peut aussi
être faites dans différents laboratoires vétérinaires spécialisés
qui apportent un titrage des anticorps.
Dans tous les cas, à
ce jour, aucun de ces tests sérologiques ne différencient les
anticorps induits par une infection FeCV de ceux induits par une
infection FIPV.
Si un résultat positif
ne permet pas de confirmer une PIF, un résultat négatif chez un chat
malade permet d’écarter l’hypothèse de PIF dans la plupart des
cas.Toutefois, il est éventuellement possible d’observer un résultat
négatif en tout début de maladie si l’infection a évolué rapidement
avec une durée d’incubation très courte. Un prélèvement 15 jours
après, permet généralement d’observer une séroconversion. Enfin,
dans de rares cas, le résultat est négatif chez les chats qui sont
en fin d’évolution de la maladie probablement à cause du piégeage de
ces anticorps au sein d’immuns complexes ou chez des chats
co-infectés par le FIV.
Mise en évidence du
génome viral
Par RT-PCR, il est
possible de mettre en évidence le génome viral dans différents
prélèvements. Dans les cas de forme humide, on pourra privilégier la
recherche du virus dans l’épanchement. Dans les cas de forme sèche,
la mise en évidence du génome viral peut s’avérer plus délicate. Le
virus est difficile à mettre en évidence dans un prélèvement sanguin
et on privilégiera un prélèvement en rapport avec les symptômes
observés : cytoponction échoguidée d’un organe lésé, ponction de
liquide cérébro-spinal en cas de formes nerveuses…
La plupart des RT-PCR
ne différencie pas, elles non plus le FeCV du FIPV mais la mise en
évidence du génome viral dans le liquide d’épanchement ou un organe
lésé associée aux données épidémio-cliniques oriente très fortement
le diagnostic Avec l’avancée des connaissances, il a pu être
identifiée des mutations génétiques qui seraient spécifiques des
souches FIPV responsables de la PIF. La mise au point de RT-PCR
détectant spécifiquement ces mutations constitue une avancée
intéressante pour différencier le FIPV du FeCV (6). Toutefois
l’interprétation de ces RT-PCR dites spécifiques du FIPV doivent
toujours se faire dans un contexte épidémio-clinique de PIF. Elles
ne peuvent en aucun cas être utilisées dans le contexte dans un chat
non malade dans une perspective d’un éventuel dépistage prédictif
d’une maladie ultérieure.
Le diagnostic de
confirmation de la PIF reste l’examen post-mortem avec la mise en
évidence de lésions histologiques spécifiques (7).
Réglementation
La péritonite
infectieuse est un vice rédhibitoire. Le délai de suspicion pour
faire établir un diagnostic par un vétérinaire est de 21 jours à
partir de la date d’acquisition de l’animal. L’action pour vice
rédhibitoire doit être introduite dans un délai de 30 jours à partir
de la date de livraison de l’animal, devant le tribunal compétent.
Vaccination
La vaccination contre
le coronavirus félin n’est pas autorisée en France.
Nb : il est à noter
qu’elle existe en homéoprophylaxie et que de nombreux éleveurs ou
propriétaires d’animaux y ont recours ( nosodes de chez Ainsworth )
Prophylaxie
sanitaire
Il est très difficile
de maintenir des chatteries indemnes de coronavirus tant le FeCV
diffuse facilement sans qu’aucun symptôme ne soit visible.
Récemment sont apparus
des tests génétiques devant permettre de dépister des chats plus
susceptibles de développer la PIF suite à une infection par un
coronavirus félin. Ces tests s’appuient sur une seule étude
scientifique ayant analysé certaines parties du génome félin chez
les chats ayant développé une PIF(8). Pour le moment, l’absence de
données complémentaires ne permet pas d’apprécier l’intérêt de ces
dépistages.
Références
(1)
Holzworth J. Some important disorders of cats. Cornell Vet
1963;53:157–60
(2)
Kipar A., Meli M. « FelineinfectiousperitonitsStill an enigma ? ».
2014. Vet. Pathol. 51,505-526.
(3)
Addie D. & al. « Felineinfectiousperitonitis. ABCD guidelines on
prevention and management. » 2009. J. fel. Med. Surg.
594-604.
(4) Thiry E. « La
péritonite infectieuse féline ». 2002. Virologie Clinique.
Le Point Vétérinaire. p142-154.
(5)
Hartmann, K. « Felineinfectiousperitonitis ». 2005. Vet Clin North
Am Small AnimPract.2005 39-79
(6)
Chang HW1, Egberink HF, Halpin R, Spiro DJ, Rottier PJ. « Spike
protein fusion peptide and feline coronavirus virulence. » 2012.
Emerg. Infec. Dis. 1089-1095.
(7)
Tasker S. « Diagnosis of felineinfectiousperitonitis: Update on
evidencesupportingavailable tests. » 2018. J Feline Med Surg.
2018:228-224
(8)
Hsieh LE, Chueh LL. « Identification and genotyping of
felineinfectiousperitonitis-
associated single nucleotidepolymorphisms in the felineinterferon-γ
gene. » 2014. Vet.
Res. 45-57
CS du LOOF – fiche
coronavirus félin – version décembre 2018
TRAITEMENT DE LA PIF
AVEC LE GS : 93% de réussite !
JE RAPPELLE QU'IL
EXISTE AUJOURD'HUI UN TRAITEMENT TRES EFFICACE POUR LA PIF : le GS
AVEC UN TAUX DE 93% DE REUSSITE ! IL EST HOMOLOGUE DANS DE NOMBREUX
PAYS, pas
encore en France mais il est tout à fait possible de se le procurer
et de sauver son chat de nos jours.
Voir pour info le
site
https://www.fipmed.co qui
commercialise ce traitement.
article du loof : par
le Dr Maxime Kurz, vétérinaire à Maisons Alfort
Traitement de la péritonite infectieuse féline :
enfin un traitement légal et accessible
La péritonite infectieuse féline est une maladie virale grave. Dûe à
un coronavirus spécifique du chat, elle entraîne des épanchements
(accumulation de liquide) dans le thorax et l'abdomen, des troubles
neurologiques, oculaires, une fièvre. Elle touche préférentiellement
les jeunes chats, mais peut affecter des chats de tout âge. En
l'absence de traitement, la maladie est mortelle en quelques
semaines. Ces dernières années ont été le témoin de l'utilisation
d'un antiviral, le GS-441524, pour le traitement de cette maladie.
Administré sous forme injectable ou orale pendant une durée de 3
mois, ce traitement permet une guérison complète de la majorité des
chats atteints de péritonite infectieuse féline, indépendamment de
sa forme clinique. Cette substance n'étant pas référencée comme un
médicament vétérinaire (aucun laboratoire n'ayant réalisé les
démarches conduisant à l'autorisation de son utilisation), elle
était malheureusement utilisée hors du cadre légal : ce traitement
était généralement vendu sur des réseaux sociaux, par des individus
n'ayant pas de formation spécifique en pharmacie ou médecine
vétérinaire, sans possibilité de traçabilité, de contrôle de la
qualité pharmaceutique des échantillons, ni de leur concentration en
principe actif.
Cette année est le témoin d'une révolution thérapeutique en médecine
féline. Depuis quelques jours, grâce à la pharmacie Delpech, il est
possible de traiter la péritonite infectieuse féline en toute
légalité. En effet, la pharmacie est désormais habilitée à préparer
une pâte orale à base de GS-441524 après une prescription
vétérinaire, et à la distribuer aux vétérinaires et aux
propriétaires d'animaux de compagnie. Autorisée par la législation
française, la pureté, la qualité et la concentration de ces
préparations pharmaceutiques sont vérifiées. Le médicament est
facile à administrer car rendu appétent par un arome de poisson. Il
est disponible en deux concentrations : l'une pour les chats de
petit gabarit (< 4 kg), et l'autre pour les de plus gros gabarit (>
4 kg). Administré quotidiennement pendant 3 mois, le GS-441524 est
bien toléré est associé à une résolution des signes cliniques dans
80 à 90% des cas selon les études. Lors de PIF de forme dite
"humide" (c'est à dire associée à des épanchements thoraciques et/ou
abdominaux), une publication récente rapporte que le traitement est
tout aussi efficace qu'il soit administré pendant 84 ou 42 jours.
Concernant le coût, ce dernier reste en cours de calcul mais il
serait vraisemblablement de l'ordre de 500 à 900 euros pour les 84
jours de traitement, selon le poids du chat.
Le comité scientifique du LOOF tient à rappeler que l'administration
de ce traitement doit être décidée uniquement en conclusion d'une
démarche diagnostique complète, et après avoir confirmé une
péritonite infectieuse. Le plus communément, cette démarche repose
sur l'identification du génome du coronavirus par un examen de
RT-PCR réalisé sur ponction d'organe ou de liquide (épanchement,
humeur aqueuse, liquide cérébrospinal). En effet, si le traitement
est typiquement bien toléré, des effets secondaires rénaux ou
urinaires restent possibles. La balance bénéfice/risque doit donc
être évaluée pour chaque cas, comme pour tout médicament. En cas
d'utilisation déraisonnée, l'apparition de phénomènes de résistance
aux antiviraux est possible dans le futur, et risque de priver des
chats d'une chance de guérison. L'utilisation de GS-441524 n'est par
ailleurs pas recommandée en prévention chez des animaux sains.
A notre connaissance, aucune pharmacie ou laboratoire ne développe
de forme injectable de GS-441524 à ce jour en France.
Maxime Kurtz, vétérinaire
Spécialiste européen en médecine interne (Dipl. ECVIM-CA)
Enseignant-clinicien à l'Ecole Nationale Vétérinaire de Maisons
Alfort
Responsable de la sous-comission "Péritonite Infectieuse Féline" du
Comité Scientifique du LOOF
|